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 Bus 66 en provenance de Chicago

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Annabel Desormiers

Annabel Desormiers


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Date d'inscription : 26/07/2008

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MessageSujet: Bus 66 en provenance de Chicago   Bus 66 en provenance de Chicago Icon_minitime1Mer 22 Oct - 5:02

Affalée dans son siège de velours ocre usé, les écouteurs de son iPod fichés dans les oreilles, Annabel somnolait, sa tête dodelinant contre son épaule à chaque chaos.

La vieille dame à ses côtés, irritée, se demandait: comment peut-on dormir en ayant tant de décibels dans les oreilles? La jeune femme adorait Rammstein et la musique teutonne débordait des écouteurs blancs.

Annabel n'en pouvait plus. Sa tournée avait fait chou blanc à Chigago; depuis son début, elle s'essoufflait. La compétition était ardue; les filles, de plus en plus nues, de plus en plus vulgaires, taillant des pipes pour cinquante biftons et un dry-martini, faisaient baisser les prix et détournaient les yeux des badauds.

Il se trouvait toujours, dans tous les bars, un type un peu plus classe que les autres. Mais ce n'était pas lui qui lui bourrait le string de billets. Elle refusait avec un vague dégoût la plupart des propositions sexuelles, n'acceptant quelques avances que lorsque le type était d'un physique et d'une compagnie acceptable, et avait visiblement le portefeuille bien fourni en liquidités. Une fois, elle était tombée sur un dingue, malsain, qui avait voulu faire mine de l'étrangler pendant l'action...

Un solide coup de poing dans les reins et une vigoureuse ruade l'envoyèrent bouler à l'autre extrémité de la pièce alors qu'Annabel, abandonnant son habit au profit de son éternel, fidèle et long manteau, lourd et noir, de suède noir doublé de velours bordeaux qui l'avait dissimulée jusque chez elle, où elle avait verrouillé toutes les portes et fermé tous les rideaux avant de décider de partir. L'ancien fief du crime était glauque, pollué de racaille aux bijoux rutilants.

Le lendemain, le visage caché dans sa capuche noire, elle avait épluché tous les journaux; avec un sourire, elle avait lu un entrefilet concernant la Veuve Volen, une ex-mannequin ayant fait profession dans l'héritage et le meurtre habile. Cette fois, l'avion avait explosé. Quel accident..!

Elle accorda néanmoins de l'intérêt à un autre entrefilet: la Veuve Volen possédait un bar qui allait bientôt ouvrir. D'après ses souvenirs, Madrigal n'avait rien d'une lolita aux seins refaits; elle avait fait playboy à une demi-douzaine de reprises, sans compter toutes les photos en sous-vêtements pour des marques de grand luxe. À la télévision, dans les entrevues, elle affichait toujours un ton légèrement hautain, une élégance foudroyante qui reléguait dans l'ombre de l'insignifiance les décolletés et les jupes courtes des starlettes à ses côtés.

Annabel avait du mal à se figurer une telle femme à la tête d'un bordel où les minettes se la frotteraient sur les poteaux en inox en tripotant sa devanture rénovée. Riche comme elle devait être après ses héritages successifs, elle devait avoir pu monter quelque chose de classe.

Quant à partir...

L'après midi même, quelques vêtements dans un sac, elle prenait le bus pour Depracity, où la Volen tenait son Antre. L'Arachnid's Nest; ça sonnait bien, et c'était terriblement irrévérencieux de la part d'une femme surnommée la Veuve Noire.

Mais le trajet durait des plombes.

Annabel remua mollement, ouvrant les yeux sur le paysage moche à en rire d'un automne nuageux et crachotant dans une banlieue américaine. Les jouets traînaient encore partout, attendant d'être patiemment dissimulés par la neige tandis que les parents exhortaient leurs gamins à l'ordre. Mais la nature donnait raison aux enfants; les pelouses, soigneusement ratissées quelques jours auparavant, se couvraient à nouveaux de feuilles brunies et rongées, imbibées d'une eau glaciale, rétablissant l'ordre naturel du joyeux bordel.

Elle ferma les yeux et se cala contre le dossier, mais sentait qu'elle ne se rendormirait plus. Ils approchaient, et elle n'avait pas envie que le chauffeur, un type bourru aux mains moites, ne vienne la réveiller.

Elle changea la musique pour les canons de Pachelbel au violon, au grand soulagement et étonnement de sa voisine de siège.

Quarante minutes plus tard, elle récupérait son sac et écuma les stations-services pour trouver l'Arachnid's Nest.
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